et maintenant par les rues sourdes
rien ne vient éclairer
les belles heures languissantes
je peux à peine distinguer
les vieilles choses éteintes du passé
les blessures de ce coeur
se voulant impassible
et ces jeux de miroirs dont je trouvais
les formes dans une crevasse au mur
la vie rugissante d’écume
au souffle bouillonnant du printemps
la mort si rouge
enrubannée de blanc...
ce que je dois faire aujourd’hui
tient en quelques frissons de phrases :
marcher près du canal et laisser aller
mon regard au hasard
de la lisière de l’eau à la surface
l’un dans l’autre et inversement
brouillard et volupté cruelle
ce voile vaporeux où crèvent les regrets
je vois un peu ces lieux
comme des ombres errantes
lassées de tout et venues mourir
dans leur solitude si précieuse
portées par le convoi du matin
à travers les vallons
je sens bien que mon coeur est mort
il ne sent plus ce signe avant-coureur
de la sérénité
bercée par une douceur lente
que faisons-nous de ce qui meurt en nous
ces extases qui ne franchissent
jamais la rive et ces heures
dont les échos nous parviennent
à travers les orages ?
je rase aussi parfois l’autre rive
embrumée et ceinte d’un panache
qui voit la fumée de la brume
se mêler aux cyprès et aux champs
aux nefs tout en haut des érables
courbés dans le vent et la poussière
et marchant des heures et des heures
toujours seul et volontaire
fuyant les grappes humaines
et l’agitation vaine des soirs de liesse
je parcours toutes ces éternités
accrochées à mes basques
dix mille années d’humanité
sans un seul jour majestueux et calme
ou soulevant la poussière
inscrites dans ces rides
qu’ont creusées patiemment les siècles
dans leur obstination
je suis celui dont le désir unique
est de se découvrir
et toi n’as-tu rien vu
dans les eaux grises du canal ?
Ecrit le
Mar 01 Mars 2005, 09:57
par avedekian,
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